mercredi 10 avril 2013

Vietnam : une nouvelle génération d'auteurs


Vietnam : une nouvelle génération d'auteurs

En marge du Salon du livre qui s’est déroulé à Paris du 22 au 25 mars dernier, plusieurs manifestations ont été organisées en faveur de la littérature vietnamienne, en particulier une soirée événementielle au CNL et une rencontre-débat à l’Inalco, autour de trois figures de la nouvelle génération du Vietnam : Nguyen Viet Ha pour son roman Une opportunité pour DIeu, Do Kh. pour Khmers Boléro et Thuân pour T. a disparu. Les trois ouvrages ont récemment paru aux éditions Riveneuve dans la nouvelle collection "Littérature vietnamienne contemporaine" pilotée par Doan Cam Thi, traductrice et maître de conférences à l’Inalco. 

Leurs parcours et leurs recherches ainsi que les sujets qu’ils abordent, très différents les uns des autres, incarnent en quelque sorte un Vietnam sans frontière. Née au Viêt Nam, Thuân, après des études à Moscou, s’est installée à Paris qu’elle quitte parfois pour Hanoi, New York ou Berlin. Deux de ses précédents romans, « Chinatown » et « T. a disparu », ont été traduits en français. Nguyen Viet Ha, écrivain catholique vivant au Vietnam, est considéré comme l’un des chefs de file de la nouvelle génération. Il domine la scène littéraire dès son premier roman paru en 1999, Une opportunité pour Dieu. Aujourd’hui, son œuvre comprend une dizaine de romans, d’essais et recueils de nouvelles. Né au Vietnam, Do Kh., quant à lui, vit entre Paris et La Californie. Poète, nouvelliste, romancier, scénariste, essayiste, il compte parmi les écrivains les plus novateurs de la littérature vietnamienne actuelle. Khmer Boléro est son premier roman écrit en français.

Lieu prestigieux situé au cœur de Paris, le Centre National du Livre (CNL) a donc reçu le 18 mars dernier les trois écrivains vietnamiens en compagnie de Doan Cam Thi. L’importance de l’événement était à la mesure de sa rareté : le CNL n’avait pas accueilli d’écrivain vietnamien depuis 7 ans. Ce fut l’occasion pour le public français et de la diaspora de découvrir une littérature d’avant-garde : prolixe, diverse, cosmopolite, créatrice.

La lecture d’extraits des trois romans a été suivie d’un riche débat autour de plusieurs thèmes : la place des lettres vietnamiennes sur la scène mondiale, le rapport des Vietnamiens à la littérature, l’émergence d’une nouvelle génération d’auteurs, l’écriture comme recherche. A la question : « Quel est le thème central de votre roman ? », Do Kh déclare avec un sourire malicieux : « C'est peut-être l'exil ou l'amour ou encore le plaisir sexuel,... mais tout cela n'a aucune importance, car ce qui prime pour moi c'est le plaisir des mots ». Aux questions : « Comment êtes-vous devenu écrivain ? Pourquoi avez-vous choisi d’écrire le roman ? », Nguyen Viet Ha réplique : « Pourquoi suis-je devenu écrivain ? Je l’ignore. Il faudrait le demander à Dieu. Quant au roman, c’est lui qui m’a choisi ».

Le lendemain, une rencontre suivie d’un débat mené par Nguyen Ngoc Giao et Jean-Pierre Han a eu lieu à l’auditorium de l’Inalco. Le très beau et tout nouveau bâtiment des Langues ‘O dans le 13e arrondissement de Paris a déjà accueilli depuis la rentrée de nombreux événements culturels organisés par la section de vietnamien de l’Inalco, souvent en collaboration avec la section de vietnamien de l’Université Paris-Diderot. Les étudiants des deux sections – situées aujourd’hui à deux pas l’une de l’autre – qui travaillent tout au long de leur formation sur la littérature vietnamienne, ont saisi avec enthousiasme l’occasion de discuter de vive voix avec les auteurs et d’approfondir leurs connaissances. Le débat a été particulièrement animé autour de l’origine et du sens de la citation mystérieuse que Nguyen Viet Ha a donnée comme exergue de son roman : « L’ultime impasse de l’homme est une opportunité pour Dieu ». Cette rencontre, riche aussi en découvertes pour les étudiants sur le travail d’écriture, est un témoignage toujours renouvelé de l’ouverture de l’Inalco au dialogue et au brassage des cultures.

Le succès de ces manifestations littéraires auprès du nombreux public francophone et de la diaspora venue de Paris, mais aussi de Prague, d’Amsterdam, de Berlin,…  traduit un réel intérêt pour le Viêt Nam. Au-delà de la littérature, c’est l’image du pays qui est en jeu. « Le Viêt Nam ne saurait être réduit à un régime politique, à une guerre ou à une carte postale, affirme Doan Cam Thi. C’est avant tout un peuple ouvert sur le monde et féru de littérature ». L’œuvre de ses jeunes auteurs, ces nouveaux héritiers d’une longue tradition lettrée, est sans aucun doute la facette la plus dynamique de la vie culturelle du Vietnam.

Doan Cam Thi

Voir sur le site du CNL : Le Vietnam : une nouvelle génération d’auteurs et 
de la collection « Littérature vietnamienne contemporaine » des Editions Riveneuve.

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